En raison de la situation politique instable, les schémas migratoires en République centrafricaine se caractérisent principalement par des déplacements internes et des flux de réfugiés. De plus, l'exode de nombreux Centrafricains vers les pays voisins ou d'autres pays a donné naissance à une importante diaspora politiquement active qui aimerait s'engager auprès de son pays d'origine. Tous ces facteurs ont incité le Gouvernement de la République centrafricaine, concrètement le Ministère de l'Intérieur, de la Sécurité Publique et de l'Administration Territoriale, à faire de l'élaboration d'une politique migratoire globale et du renforcement des capacités une priorité pour les années à venir, en demandant à MIEUX une assistance technique qui vise à développer une feuille de route pratique pour le développement et la mise en œuvre des futures politiques publiques, y compris un aperçu des besoins de formation pour les fonctionnaires de la migration.
Mamadou Togui Dabo, Conseiller des Affaires étrangères au Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale de la République du Mali, vient de participer comme expert dans l’Action que MIEUX y mène et partage son expérience avec nos lecteurs.
C’est la première fois que vous participez au programme MIEUX. Quelle est votre impression générale? Y a-t-il quelque chose qui vous a surpris ou qui s'est démarquée dans le cadre de votre expérience?
D’abord, ce fut un honneur et un privilège pour moi de prendre part à cette activité [un atelier sur la thématique des migrations irrégulières] en République centrafricaine, du Programme MIEUX. A travers son expertise, le professionnalisme et la qualité de son personnel, le programme jouit d’un crédit assez important et d’une réputation saluée sur la scène internationale. Cette réputation s’est surtout manifestée par l’accueil, le respect, la courtoisie, l’enthousiasme et l’assiduité dont les autorités centrafricaines et l’ensemble des participants ont fait preuve.
Ensuite, j’ai été agréablement surpris à plusieurs égards, entre autres par la préparation de l’activité entre les experts et l’équipe MIEUX ; par la volonté et la détermination des autorités centrafricaines de parvenir à une meilleure gestion des questions de migration ; par la confiance des autorités au Programme MIEUX; et enfin, par la qualité des échanges entre les experts et les participants locaux.
Sur ce point, il est important de signaler que cette activité s’est révélée une excellente session de partage d’information et d’expériences en matière de prévention de la migration irrégulière, de gestion interinstitutionnelle de la migration et d’autres questions connexes. En somme, cette activité en République centrafricaine m’a permis d’analyser davantage les questions de migration dans une autre région d’Afrique, disposant de spécificités particulières.
Quelles sont les principales similitudes que vous percevez entre le Mali et la République centrafricaine en termes de migration et de mouvements de population?
Les Républiques du Mali et Centrafricaine, confrontées depuis quelques années à des crises politico-sécuritaires, partagent un nombre important de similitudes en terme de migration et de questions transversales, dont les principales vont des défis sécuritaires à la nécessité d’un développement socio-économique.
À l’instar du Mali, la migration apparaît comme une stratégie de lutte contre la pauvreté si l’on s’en réfère aux caractéristiques géoéconomiques et socio-culturelles de la République centrafricaine. La porosité des frontières, le chômage des jeunes et les crises sécuritaires, qui favorisent les activités des organisateurs de la migration irrégulière et des auteurs de crimes organisés dans ces deux pays d’immigration, et d’émigration, demeurent entre autres, les principaux défis à relever.
Quelles autres étapes et conditions pensez-vous être nécessaires pour le développement de la future politique de migration ?
Dans le cadre de l’élaboration de sa politique de migration, la République centrafricaine pourrait entreprendre un nombre d’actions, notamment en appelant la coordination nationale au Ministère de la Securité Nationale à élaborer les termes de références pour la future politique de migration et les faire valider par une réunion interministérielle.
En vue de parvenir à une appropriation nationale de cette politique, lesdits termes de références doivent prévoir des consultations nationales sur toute l’étendue du territoire centrafricain afin de rencontrer tous les acteurs (étatiques et non étatiques) intervenant sur les questions de migration. La diaspora centrafricaine devrait être impliquée également.
Cette consultation aura l’avantage d’intéresser l’ensemble des acteurs et de prendre en compte leurs avis, préoccupations et perspectives en fournissant aussi des informations pertinentes pour la définition de l’état actualisé du contexte national, la formulation des objectifs, des axes stratégiques, des indicateurs et des activités à mener pour une prise en charge effective et complète des questions de migration en République centrafricaine. Munie de toutes ces informations, la commission pourra ainsi entreprendre la rédaction d’un projet politique de migration qui devra prévoir des stratégies pour agir sous ses axes stratégiques à travers un plan d’action.